mardi, novembre 06, 2007

le voyage en Grèce, vol. VI

Virée avec J. entre Sophocleous et Menandrou. Le coin des camés. Là où il bosse depuis plus d’un mois à les prendre en photo. Deux cents personnes qui se piquent en pleine rue du matin au soir à deux pas du marché municipal. Je me prends une claque, violente, irrémédiable. J’imagine Barbès au début des années 1980. Les seringues partout, les bras et les jambes en sang, les regards vides, et vitreux, et si vides. Je suis mal.

J. se déplace au milieu des grappes d’êtres avec l’aisance de l’aiguille qui évite le pus du furoncle pour trouver le sang de la veine. Je suffoque, tremble. Je ne sais pas comment être, comment regarder. Je ne sais qui être.

On passe au milieu d’un groupe en pleine séance de shoot collectif. Les liquides giclent et suintent.

Je ne vais pas sortir le couplet sur la porte de l’Orient, mais là, le soleil, le chaleur, les Géorgiens, Libyens, Albanais et quelques Grecs échoués au Pirée voici sans doute une dizaine d’année, avec peut-être des rêves d’Occident plein la tête. Cet Occident qui s’arrête au coin de la rue Sophocle. Putain de signe. Putain de cliché.

(merci à lui pour la tof)

On bouge sur Filopappos. Troisième claque mystique que renforce la scène d’il y a moins d’une heure. La montée au paradis après la descente aux enfers. Deuxième cliché.

Un homme, seul, regarde l’horizon et médite sur l’incongruité du monde. Je pense, aussi, tellement. A ces hommes d’il y a une heure. A ce lieu magique où, encore une fois, admiration, réflexe et mécanisme, j’offre les premières gouttes de la bouteille que je viens d’ouvrir. Rendre à la terre. Le soleil descend. On va au bout de la colline, au bout du monde. Le Pirée au loin. On métaphysique de comptoir comme c’est pas permis et pourtant c’est puissant et vrai et simple et lucide. Eternel. Pour la troisième fois, je laisse un foutu bout de mon âme à la colline des Muses.



Coup de fil à la belle de l’avion que j’entends sourire à l’autre bout du téléphone. Oui, on se voit ce soir.

J’arrive au bar. Rage hurle à fond Bombtrack. Lefko krassi. Je me marre. L’attente est belle sous les oliviers.

She came. Nos mots. Le vin. Un problème d’échecs. Du raki au miel. Seuls. Athènes irradie par tous les porches où un chien errant fait semblant de nous attendre. Magie de l’ivresse de la rencontre. Efkaristo.



« Dans un vieux carnet rouge
Restent écrits
L’heure et le lieu de notre rencontre. »

Ishikawa Takubouku

2 commentaires:

el rubab a dit…

je sais pas ce que tu nous réserves avec cette demoiselle, man, mais je la sens bien la suite ...
P.S: traduis-nous les mots écrits en grec s'te plaît, parce que pour moi c'est ... euh ... du chinois

ubifaciunt a dit…

lefko krassi = un verre de blanc
efkaristo = merci
Takubaku, eun non, c'est le nom du japonais

(moi aussi, je la sentais bien, la suite...)