Ça fait toujours ça la première fois.
Aéroport. Zone de transit, froide, aseptisée. Êtres en partance. Mauvais anglais devenu une norme internationale et le capitalisme qui ne prend même plus la peine d’être triomphant. Je stresse, malgré tout. Clope, chiottes, clope, chiottes, clope… Et nom de Dieu c’est triste, Roissy, le dimanche.
Alors qu’en fait, l’avion, c’est plutôt rigolo. Surtout quand ta voisine est une charmante bilingue de trente ans habitant à Exarchia, le quartier regroupant tout ce qu’Athènes compte de furibard-e-s et de déglingué-e-s. Surtout quand les deux verres de blanc tapent directos dans le crâne. Surtout quand elle te donne son numéro de téléphone en te disant de surtout pas oublier de la rappeler.
Eleftherios Venizelos. Trois quarts d’heure de bus pour rejoindre Syntagma. J’écarquille les yeux comme tout pékin qui débarque dans un ailleurs. Lecture frénétique de toute pub, de toute enseigne, des moindres traces écrites. C’est donc ça, la Grèce, un peu.
Le J. -avec qui je vais crécher les deux semaines- m’attend sur la place du Parlement et me saute dans les bras, trop heureux de pouvoir enfin parler français. Je me marre, trop heureux d’être à Athènes. Je sors l’appareil pour le premier pochoir anar du séjour.
Il me traîne dans une taverne. Pas encore trop dépaysé, je pourrais être ce gars allant bouffer dans un quelconque resto grec, n’importe où. Et pourtant. Premier verre de Retsina. Le litre va y passer. Souvlaki et poulpe. Huile d’olive.
Virée vers Monastiraki, je n’ose pas trop regarder là-haut, où je devine pourtant sa présence. Je me concentre sur les tags, me marre avec J., m’émerveille d’un rien. Et ces tags, quand même, partout, pas un bout de mur qui n’ait perdu son pucelage.
Et puis, tout doucement, oser. Lever les yeux. Sentir son poids. Ça fait 2500 ans qu’elle m’attend, ça fait plus de 10 ans que je la désire. Mais ne surtout pas y aller comme ça, comme un barbare, le premier soir. On a tout le temps. Je viens en paix. Se reconnaître, déjà. Tourner autour, un peu, de loin. Putain qu’elle est belle. Sortir l’appareil. Prendre une photo, non pas d’elle, mais d’autres colonnes, avec elle au loin, en flou. Ne rien brusquer.
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6 commentaires:
bon retour à toi Ubi, soit le bienvenu
dis-voir, un retour en France un dimanche de changement d'heure, çà doit quand même être pire qu'un dimanche de départ à Roissy, non?désolé pour le trip nostalgie, t'inquiètes je comprends je reprends le taf demain après deux semaine de congé (dans ma tête y 'a comme un vers de Baudelaire, ou la chanson d'Edith Piaf "je hais les dimanches" que j'ai encore jamais osé écouter)
merci pour les photos vieux, on attend les autres avec impatience
iassou sidrophé !
et hard luck pour le taf par un joli lundi de pluie
la suite arrive...
(pas terrible terrible, la Edith a fait mieux)
Mmh ouaip, la grèce et ses mystères... vivement la suite :)
ah les mystères (d'Eleusis ?)...
et comment se fait-il que lien vers les poulpes ait disparu ?
mystère, remède...
"et le capitalisme qui ne prend même plus la peine d'être triomphant"; bravo pour cette phrase Ubi, je l'avais pas relevé la première fois... Peut-être pas triomphant, mais cynique quand même le capitalisme: une petite remarque au passage: j'étais l'autre jour avec ma mie à Conforama (je cite le nom c'est important parce que çà fait un magasin de plus à boycotter); je sais plus ce qu'on cherchait, mais d'un coup je relève la tête et au-dessus d'un buffet je vois la pancarte "magasin sous surveillance vidéo", jusque là rien de choquant, c'est normal, faut quand même pas qu'on se fasse la malle avec un canapé sur le dos ni vu ni connu, c'est la moindre des choses. Puis j'en vois un deuxième de ces panneaux, et là j'en vois partout, et savez-vous ce qui est écrit sur la moitié d'entre eux: "souriez vous êtes filmés" (et c'est pas Ubi qu'avait collé un sticker militant à la va vite, non, c'était bien estampillé Conforama) . voilà comment on vous prête des mauvaises intentions l'air de rien. faudrait peut-être qu'ils accueillent un peu mieux les gens si y veulent les revoir un jour chez eux les salopards (y a des hommes politiques qu'en ont pris de la graine apparemment)
çà me dégoûte tiens, mais çà me surprend plus. Finalement y'a pas de racisme dans ce pays, c'est simplement qu'on aime pas les pauvres et çà c'est pas nouveau.
Sinon, superbes les photos Ubi, t'as du frissonner, surtout de nuit comme çà ... magnifique
1° Je ne colle jamais mes stickers à la va vite ;-)
2° Merci, j'étais content de l'avoir trouvée celle-là...
3° J'en parlais ave les camarades grec-que-s, c'est dingue comme nous avons intériorisé et accepté le contrôle, et de ce fait, la méfiance et la peur. La servitude volontaire, ça reste quand même le truc le plus diablement efficace en matière de contrôle social.
4° Oui, oui, les poils qui tressaillent, les yeux qui sans raisons s'embrument, le coeur qui accélère, une sorte de vertige, au sens propre. Pascal, le double infini, tout ça, ressenti en live.
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