lundi, février 09, 2009

Hommage à la Princesse


Puisqu'il n'a jamais rien compris et ne comprendra jamais rien, puisqu'il n'a sans doute jamais rêvé d'être mousquetaire avec Dumas, républicain avec Malraux ni même connard avec le Drieu qu'écrivait quand même pas si mal -ni même Céline à tout le moins- puisqu'il ne saluera jamais chez Barthas la "haute valeur historique" et la "véritable oeuvre littéraire", puisqu'il se méprend sur l'un des plus beaux chefs-d'oeuvre du patrimoine, celui qui relie Lascaux au comico de Clichy cramé en novembre 2005, puisqu'il ignore l'histoire et gerbe sur les Glières, puisqu'il conchie les mots et le reste, puisque de toute façon voilà quoi, on ne saurait écrire sans savoir penser au préalable, il est juste que ce soit elle qui porte l'étendard de la fin de ce monde. Elle a ouvert la voie. Aux moralistes du XVIIème, langue si pure que le Nietzsche eût voulu voir traduite en grec ancien, au scalpel des orateurs révolutionnaires méprisant la poussière qui les composent et qui parlent pourtant, au flot du XIXème que le bon Gustave exsude, à Louis-Ferdinand et à Marcel, à moi, aussi, un peu, même si elle doit bien s'en foutre.

Elle doit bien se marrer aussi qu'il ait autant "souffert sur elle...". Elle doit juste attendre que la Emma B. la rejoigne dans la charrette parce que bon, hein, les histoires de pharmaciens à Yonville-l'Abbaye, ça va bien cinq minutes, mais faut qu'on r'tourne à Gandrange... 





Et donc, l'air de rien, trois cents ans plus tard, elle revient, douce, retirée, volatile. Et je lis ça, aujourd'hui, ici :

"La grève, à Paris IV comme ailleurs, nous l’avons voulue active. Cela veut dire que vous venez en cours ; simplement, nous changeons de programme. Nous pourrons explorer toutes sortes de sujets, débattre autour de films, analyser si vous le voulez les discours et représentations autour de l’université, ici et aux Etats-Unis, examiner le rôle des médias dans un mouvement comme celui qui a lieu actuellement, le vocabulaire utilisé pour parler de la colère. Pourquoi dire que nous avons “peur”, vocable qui revient le plus souvent? Pourquoi l’omniprésence du mot “grogne” pour évoquer nos protestations et actions, alors que le gouvernement, lui, n’est pas décrit comme “aboyant”? Quelles métaphores pour structurer quels discours et quels partis-pris? Toutes sortes d’événements un peu ludiques seront par ailleurs programmés, parmi lesquels des cours dehors (s’il fait moins froid), pour que l’on sache ce qu’est un cours universitaire ; des ateliers de correction de copie sur les discours de Valérie Pécresse (définissez le mot “dialogue”) ; (...) pendant que d’autres défilent en toge — chacun manifeste à sa manière." 

Et évidemment, les (...) pour la bonne bouche :

"certains de mes collègues de lettres d’autres universités font aussi des lectures à voix haute de la Princesse de Clèves tant haïe de M. Sarkozy"

Hu hu hu.

Je mate sur Wikipédia, quéqu' fois que... Et là, nouvel éclat de rire intersidéral, je tombe sur ça...





La résistance s'organise diablement, les z'aminches. Promis, la prochaine manif', au beau milieu du cortège des méchants terroristes anarcho-autonomes franciliens internationaux, je défilerai avec "ma" Princesse de Clèves fièrement brandie. Par contre, faudra juste que je fasse gaffe à pas me planter de main avec le pavé que j'aurai dans l'autre au moment de balancer l'objet. 

(Et pour mémoire, au moment du premier discours, y avait même le Beigbeder qui y était allé de sa tendresse. Lui par contre, faudra qu'il fasse gaffe avec le sachet de coke dans l'autre main au moment de balancer l'objet.)





Le dernier mot à la Princesse, pour finir. Toute ressemblance avec... 

Mais là n'est même pas l'important. De la beauté à l'état le plus pur et le plus simple.

J'imagine la Cour au loin, les fastes de Versailles ont supplanté ceux de Vaux que les souvenirs embrumés par le temps ont déjà fait légendes, Louis triomphe et l'on ne se presse plus guère au passage de la Reine. 

"Il n'y avait aucune dame dans la Cour dont la gloire n'eût été flattée de le voir attaché à elle ; peu de celles à qui il s'était attaché, se pouvaient vanter de lui avoir résisté, et même plusieurs à qui il n'avait point témoigné de passion, n'avaient pas laissé d'en avoir pour lui."

Bientôt, Louis prendra l'Autrichienne.

Bientôt.



















6 commentaires:

Jérôme Leroy a dit…

Très beau, réellement. Nous sommes les moines de ces barbares-là.
La suite pour violoncelle n'est pas chargée, ou je ne sais quoi.

ubifaciunt a dit…

Puissions-nous aussi être les barbares de ces gardiens du temple...

(et corrigé pour la zizik...)

thé a dit…

Merci, ubi, pour cet hommage à "La Princesse de Clèves"
Difficile d'écrire plus "purement". Tout en retenue, en finesse.
Etonnée de l'article de wiki ou Beigb..

Albertine a dit…

Barbara, Tom Waits et les Pixies sur votre profil.. je crois qu'on est faits pour s'entendre, rien que pour ça.
Je suis désolée de ne débarquer que maintenant chez vous. J'adore chez vous et je vais revenir.
Merci pour votre blog.

thé a dit…

lecture-marathon de La Princesse

ubifaciunt a dit…

@ thé : moi aussi du Beigbeder, étonné, je fus, mais bon... et puis merci pour le lien, j'essaierai d'aller faire un tour après le taf...

@ albertine : c'est le minimum syndical musical quand même.... bienvenue !